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25.03.2021

Loi sur le blanchiment d’argent: un tiens vaut mieux que deux tu l’auras

Début mars, le Conseil national a examiné la révision de la loi sur le blanchiment d’argent (LBA) pour la troisième fois et il a globalement approuvé le projet dans la version du Conseil des Etats. Une seule divergence subsistait encore à propos de la définition du critère déclenchant l’obligation de communiquer. Cette divergence ayant été éliminée par le Conseil des Etats, le projet a été adopté lors du vote final du 19 mars 2021.

Rétrospective

Le Groupe d’action financière (GAFI) soumet les places financières internationales à des examens réguliers, dont il publie les résultats sous forme de rapports d’évaluation mutuelle par pays. En cas de conformité lacunaire de sa réglementation, le pays concerné peut se voir imposer un processus de suivi. Si le GAFI, en 2016, a reconnu la bonne qualité d’ensemble du dispositif suisse de protection, il a identifié des améliorations à apporter dans certains domaines (cf. Rapport d’évaluation mutuelle, Suisse, 2016). Depuis, la Suisse est  soumise à un processus dit de suivi renforcé (enhanced follow-up process).

Afin de permettre une sortie de ce processus, le Conseil fédéral a adopté le message concernant la modification de la LBA (objet 19.044) le 26 juin 2019. Le projet répondait dans une large mesure aux critiques du GAFI. Toutefois, divers aspects ont donné bien du fil à retordre au Parlement. En mars 2020, face à l’opposition véhémente des conseillères et des conseillers, le Conseil national a refusé d’entrer en matière sur l’objet. La Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats a donc supprimé du projet la disposition concernant les conseillères et les conseillers – disposition que le secteur bancaire jugeait certes souhaitable, mais sans en faire une condition sine qua non. Cela a permis d’éviter un refus d’entrer en matière et le Conseil des Etats a délibéré sur l’objet à l’automne 2020. Le projet du Conseil fédéral a également été amputé, entre autres, de la disposition concernant l’abaissement du seuil pour les paiements en espèces en relation avec le commerce des métaux précieux et des pierres précieuses. En dernier lieu, à propos du critère obligeant les intermédiaires financiers à communiquer leurs soupçons au Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent, une proposition contestée a ravivé les incertitudes. Seules d’intenses négociations entre la branche et les autorités ont permis de trouver une solution acceptable. Cette proposition d’art. 9, al. 3 LBA a été intégrée dans le dépliant sous «Minorité I».

Une dernière chance au Conseil national

A l’issue de débats parlementaires longs et passionnés, une majorité bourgeoise a fini par s’imposer le 1er mars 2021. Le Conseil national a adopté le projet lors du vote sur l’ensemble par 123 voix contre 67 et une abstention. Il s’est rangé pour l’essentiel à la version du Conseil des Etats.

Restait en suspens la question de savoir dans quels cas précis les intermédiaires financiers seraient tenus de communiquer leurs soupçons de blanchiment d’argent. Afin que les commissions puissent réexaminer en détail la formulation à retenir pour la définition du critère déclencheur, et donc du «soupçon fondé», à l’art. 9, al. 3 LBA, le Conseil national a opté pour une divergence et a suivi la Minorité I existante.

Le Conseil des Etats a éliminé cette dernière divergence en se ralliant à la version du Conseil national le 10 mars 2021.

Vote final et perspectives

Dès le départ, le projet de loi révisée sur le blanchiment d’argent a été soumis à des tiraillements politiques entre la gauche et la droite, ce qui n’a pas joué en sa faveur. S’il a failli sombrer à plusieurs reprises, les derniers développements sont plus réjouissants.

Lors du vote final du 19 mars 2021, le projet a été adopté au Conseil des Etats à l’unanimité et, au Conseil national, il a réuni une majorité bourgeoise de 120 voix contre 69 et six abstentions. L’Association suisse des banquiers (ASB) salue expressément cette évolution.

La branche a toujours considéré que l’adoption du projet, et donc la perspective de sortir du processus de suivi renforcé, étaient prioritaires. Les dispositions révisées intègrent une grande partie des propositions initiales du Conseil fédéral, comme par exemple l’obligation de vérifier l’identité de l’ayant droit économique et celle de vérifier périodiquement l’actualité des données relatives aux clients. De plus, la formulation retenue pour définir le critère déclencheur de l’obligation de communiquer, c’est-à-dire le «soupçon fondé», est très proche de la jurisprudence en vigueur. En d’autres termes, l’art. 9 LBA tel qu’il est rédigé codifie pour l’essentiel une jurisprudence existante soutenue par le GAFI, de sorte qu’il n’en résulte aucun changement de pratique pour les banques. Malheureusement, il n’a pas été donné suite à notre proposition de supprimer les sanctions pénales en cas de négligence prévues à l’art. 37, al. 2 LBA. Il s’agit pourtant d’un enjeu crucial pour les membres de l’ASB, de sorte que cette dernière restera mobilisée à ce sujet.

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Rédacteurs

Natalie Graf
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